Avec #RapDeal, notre agence 135 MÉDIA met à profit son expérience pour présenter les coulisses du monde du rap. Après vous avoir expliqué l’intérêt et l’utilité des labels, le fonctionnement des éditions musicales et de la SACEM, ou encore celui des avances, notre émission de vulgarisation de l’industrie musicale est de retour avec une thématique très commentée mais peu comprise par le grand public : les ventes et les certifications…
Aujourd’hui, les ventes d’albums sont de plus en plus commentées, sur les réseaux sociaux notamment. Un artiste qui ne dépasse pas les 800 ventes en première semaine va avoir tendance à être moqué, tandis qu’un projet réalisant un gros démarrage va directement être vu comme un succès. Or, derrière ces chiffres peuvent se cacher des réalités bien différentes et c’est pourquoi nous avons décidé de consacrer ce cinquième épisode de #RapDeal aux ventes et aux certifications.
Comment sont calculées les ventes
En France, c’est désormais Official Charts Company (successeur de GFK) qui est chargé par le SNEP de calculer le top album. Ce top concerne les ventes françaises uniquement et ne reflète donc pas le succès d’un projet à l’étranger. Ces ventes vont être calculées à compter de la date de sortie officielle de l’album, on ne prend pas en compte les singles qui sortent en amont, bien qu’ils génèrent du chiffre d’affaires.
Dans les ventes du top album, sont pris en compte :
- Les ventes physiques (CD et Vinyle) : Ventes en magasin + ventes en D2C
- Les téléchargements d’albums : Les ventes effectuées sur les plateformes digitales
- Les équivalents ventes en streaming : Le calcul des “équivalents ventes” streaming est fait via le top single. On va commencer par additionner tous les streams de + 30 secondes fait avec des comptes premium (les streams des comptes gratuits Deezer ou Spotify ne comptent pas pas dans le top) et on va y ajouter les téléchargements unitaires de single convertis en streaming (1 DL = 150 streams). À ce montant global, on va retirer la moitié du nombre de streams du titre le plus consommé de la semaine , et diviser le total par 1500
Le montant final sera ajouté au top album sous le nom « d’équivalent ventes en streaming »
Le retrait de la moitié du titre le plus consommé (même s’il génère quand même de l’argent) sert à limiter « l’effet single », c’est à dire un morceau trop puissant qui fausserait le succès de l’album. Derrière ces tops, les succès peuvent être très différents selon les écoutes non-premium, l’explosion d’un single, les extraits sortis avant l’album ou encore les ventes à l’étranger.
Les certifications SNEP
Lorsque l’on dépasse un certain palier de ventes, singles ou album, des certifications sont délivrées automatiquement par les syndicats de producteurs : Le SNEP plutôt pour les projets des majors et l’UPFI généralement pour les projets indépendants.
Ces certifications albums sont atteintes aux paliers suivants :
- Disque d’or : 50k albums vendus
- Disque de platine : 100k albums vendus
- Double disque de platine : 200k albums vendus
- Triple disque de platine : 300k albums vendus
- Disque de diamant : 500k albums vendus
- Double disque de diamant : 1M d’albums vendus
Pour les singles, ce sont les écoutes streaming premium ainsi que les téléchargements digitaux convertis en stream (1 DL = 150 streams) qui vont être comptabilisés. Les paliers de certifications de singles sont les suivants :
- Single d’or : 15 millions d’équivalent streams
- Single de platine : 30 millions d’équivalent streams
- Single de diamant : 50 millions d’équivalent streams
En 2019, “seulement” 4% des projets sont certifiés or (et 2% platine)
Une fois le projet certifié, c’est à son producteur de faire fabriquer la ou les certifications pour venir récompenser son artiste ainsi que les équipes et partenaires qui ont travaillé dessus. En France, il existe plusieurs sociétés qui fabriquent les certifications et généralement, les prix commencent à 240 € HT et augmentent selon la taille et la finition du disque. On parle beaucoup des certifications, mais elles ne concernent qu’une minorité de projet. Comme le signalait le média professionnel VentesRap, seulement 4% des albums produits en 2019 ont atteint le disque d’or (et 2% le disque de platine). De nos jours, la multiplication des certifications (surtout à l’époque où le streaming gratuit était prit en compte) a fait un peu oublier au public la difficulté d’atteindre ce genre de récompenses.
L’impact du streaming sur les ventes
Les ventes et les certifications ont été chamboulées en 2016 avec la prise en compte streaming qui pèse de plus en plus lourd dans la comptabilisation des ventes d’albums. Cette prépondérance est critiquée par certains acteurs de l’industrie qui trouvent ces ventes et certifications moins méritantes car plus facile à obtenir. Ces critiques nous semblent infondées car : soit le disque d’or va venir récompenser la popularité, et, dans ce cas, un artiste qui stream beaucoup est, par définition populaire; soit les certifications correspondent à une réussite financière et, désormais, avec la prise en compte des écoutes premiums et l’augmentation des seuils minimums de ventes, les chiffres d’affaires des ventes physiques et digitales sont de plus en plus proches. Cependant, derrière un disque d’or les situations peuvent être différentes, en effet selon les investissements réalisés dans la conception du projet et son exploitation, un disque d’or peut être autant rentable que complètement déficitaire.
De manière générale, le streaming a eu impact financier positif pour la plupart des artistes rap. C’est un genre très écouté depuis l’avènement du téléchargement illégal mais dont le public avait moins tendance à acheter que pour la variété ou la pop urbaine. Avec le streaming, les exploitations financières des albums sont plus longues, car elles ne dépendent pas de stocks en magasins. Aujourd’hui, un album peut continuer à générer des ventes bien après sa sortie, SCH en est l’exemple parfait : 22k exemplaires de sa première mixtape A7 ont été vendus entre janvier et novembre 2020, dont plus de 20k en streaming, 4 ans après sa sortie.
Pour les artistes avec une fanbase moins conséquente mais plus engagée, la baisse des ventes de CDs physiques était un problème. En effet, pour obtenir autant de ventes en équivalent stream que de ventes physiques, il faut réussir à toucher un auditoire plus large. Mais aujourd’hui, grâce notamment à l’avènement du D2C (la vente d’albums depuis le site de l’artiste), il est à nouveau possible de mobiliser sa fanbase comme l’ont très bien fait Laylow, Médine ou encore Dinos.
Pour clore le sujet, les ventes et les certifications font beaucoup parler dans le rap, cela s’explique par le fait que les médias et les artistes eux-mêmes, en parlent de plus en plus. Ce n’est pas foncièrement une mauvaise chose, mais ça nécessite que le public arrive à en comprendre pleinement les enjeux. Dans les faits, un même score peut être une réussite comme un échec selon le projet, les attentes, les dépenses… Derrière les ventes, les réalités économiques aussi peuvent être très différentes.
On vous remercie de votre intérêt sur le sujet, n’hésitez pas à aller checker nos autres #RapDeal pour mieux appréhender l’industrie musicale !